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Le blog d'education et de formation

Évaluer la performance de l’établissement scolaire : vers une obligation de résultats intelligente ? (L’expérience anglaise

2 Septembre 2010 , Rédigé par mazagan Publié dans #علوم التربية

Isabelle MARCHI-BARBAUX IA-IPR EVS

et

Romuald NORMAND Maître de conférence INRP de Lyon

 

Évaluer la performance de l’établissement scolaire :

vers une obligation de résultats intelligente ?

(L’expérience anglaise)

http://web.me.com/lucgaignard/Maitre_E/Esen_files/Evaluer%20la%20performance%20des%20e%CC%81coles,%20comparaison%20France%20Angleterre.doc

 

Introduction

 

            Les anglais ont pris au sérieux l’idée que tous les acteurs associés au système éducatif doivent comprendre la question de l’évaluation et donc les anglais ont cherché à développer l’évaluation participative afin qu’elle descende jusqu’aux élèves et aux parents d’élève. La question est : Comment améliorer un système éducatif quand il y a une obligation de résultats ?

 

 

Point de vue français

 

            Déjà en France, au sein des EPLE, les chefs d’établissements appréhendent les indicateurs de pilotage donnés par le MEN avec des postures différentes en fonction de l’avance que les académies ont plus ou moins prises sur les audits à visée participative ou les démarches d’autoévaluation…

 

Les chefs d’établissement français aux prises avec l’évaluation (40% de réponses) fonctionnent d’abord sur le ressenti et l’ambiance au sein de l’école, d’après eux quand on les interroge. Le directeur ou chef d’établissement perçoit souvent un décalage entre ce qu’il ressent (informel, subjectivité, affects, émotions, ambiance…) et les indicateurs chiffrés. Par exemple, le directeur n’aime pas utiliser le terme de management même si pourtant il gère au quotidien les ressources humaines, ce qui est du management.

 

Il y aurait donc de l’écart entre le quantifiable et la qualifiable, le qualifiable étant le pôle du ressenti.

 

Il est vrai que le directeur d’une école n’a pas toujours les moyens de mesurer leur propre ressenti car il est avant tout pédagogue et cherche à mobiliser son équipe pédagogique. 50% des directeurs disent que les données ne leur posent pas de problème et ne sont pas si éloignées de leur ressenti.

 

Alors, contradiction ? En fait, pas vraiment. Les directeurs ne sont pas contre les indicateurs mais ils précisent que ce système d’informations-statistiques ne témoigne pas vraiment de leur quotidien et ne centralise pas les données pour accompagner les actions conduites au sein de l’école au quotidien. D’autant plus que toutes ces informations et actions ne sont pas traductibles en indicateurs car elles sont partielles et peu communicables.

 

Le ressenti revient donc en force car les directeurs disent que tout n’est pas chiffrable (quantifiable) pour réussir à évaluer en interne ou en externe son école. Il y a des logiques d’action peu mesurables. Quantifier de la qualité reste difficile.


 

En fait, il y a un moyen de catégoriser les postures des chefs d’établissements sur la question de l’évaluation :

 

 

Ressenti (feeling) pour la confiance

 

 

 

Évaluation interne

Évaluation externe

Concurrence

Pilotage

 

Suivi (reporting) pour la réussite

et l’orientation (élèves)

 

Hiérarchie

 

Diagnostic (screening) pour le rendre-compte (autorités académiques)

 

 

Posture d’évaluation du chef d’établissement ou directeur d’école français

 

Point de vue anglais

 

            Pour les anglais, il est important de collecter des données fiables, de s’auto-évaluer et donc l’évaluation est placée au centre du système scolaire. Les caractéristiques sont donc les suivantes : édifier l’avenir, conduire les apprentissages et l’enseignement, développer le soi et travailler avec les autres, manager l’organisation et sécuriser l’obligation de rendre compte.

 

Si je reprends le dernier point « sécuriser l’obligation de rendre-compte », cet item signifie un partage des compétences entre les acteurs de l’école et porte sur l’obligation des résultats en Angleterre. On est proche des principes et des pratiques des systèmes d’assurance qualité comprenant l’évaluation même des écoles.

 

            Le mouvement vers une obligation de résultats intelligente à l’anglaise est précisé par le ministre de l’Education nationale anglais « un cadre d’obligation de résultats qui met l’accent sur la mise en œuvre d’une auto-évaluation continue et efficace dans chaque école, combinée à une inspection externe resserrée, étroitement articulée au cycle du changement pédagogique de l’école » afin de répondre aux objections liés à la stigmatisation des écoles ayant de mauvais résultats, répondre à la mauvais qualité des inspections conduites dans les années 1990, arrêter le bachotage des établissements, éviter le fait que certaines écoles se « débarrassent » de leurs mauvais élèves.

 

Du coup, le parlement anglais a reconnu la pression exercée auprès des enseignants appuyés par les syndicats (NUT, National Union of Teachers). En effet, le soglan est « Les écoles parlent par elles-mêmes ». Enfin le HCE a demandé aux politiques de prendre leur responsabilité afin que les acteurs aient confiance en eux et que l’on soit sur les résultats professionnels. Du coup, les relations entre MEN et écoles a donné lieu à 7 composantes :

 

  1. Une inspection qui évolue
  2. La détermination de profil d’école
  3. Une nouvelle communication entre les écoles et le MEN
  4. Des données mises à jour afin que les écoles soient tenues au courant régulièrement
  5. Un nouveau cadre d’auto-évaluation soutenu par les corps d’inspection
  6. L’introduction d’un ami critique
  7. L’instauration d’une simple conversation

 

 

Par exemple, en ce qui concerne le point n°1 « une inspection qui évolue » celui-ci se décline de la manière suivante :

 

  1. Adoption d’un cadre plus compréhensif qui interroge les élèves
  2. Inspections plus courtes mais serrées
  3. Des notifications de l’inspection plus courtes
  4. Des équipes réduites
  5. Plus d’accent sur la production de preuves et qui part de l’autoévaluation
  6. Des caractéristiques communes en terme de démarche d’inspection 1er et 2nd degrés
  7. Une simplification des catégorisations

 

A même été mis en place un code de conduite de l’inspecteur qui a été élaboré construit autour du respect de normes de justice par exemple. L’IEN doit faire preuve de d’objectivité, respecter la dignité des personnes, s’engager dans un dialogue constructif et maintenir la confidentialité des informations individuelles et sur le travail des équipes pédagogiques.

 

Enfin, si l’école n’est pas d’accord avec les résultats de l’inspection, elle peut recourir à une commission d’arbitrage (recours). D’ailleurs le logiciel PANDA (Performance and…) permet aux écoles d’avoir des informations sur la valeur ajoutée et d’avoir accès à des fiches synthèses d’informations à l’échelle nationale même si ce soft est confidentiel.

 

L’OFSTED qui est donc l’agence des corps d’inspection anglais retient 8 principes : l’évaluation doit rendre service aux élèves et pour cela l’autoévaluation est de mise afin qu’ils se posent des questions à partir de leur pratique. L’implication de tous et se passe au centre de l’école et porte sur la conduite d’actions nouvelles. Les enseignants doivent se justifier (preuves) des orientations éducatives choisies jusqu’à leur pratique. Le benchmarking est utilisé.

 

Le quantitatif et le qualitatif sont croisés afin de les comparer avec les normes officielles.

 

Le SIP (School Improvement Partner) est « un ami professionnel critique » de l’école… cet ami critique est un ami professionnel critique qui est un directeur d’école mais qui n’appartient pas à l’école même.

Son rôle : construire les compétences collectives de l’école et de donner son avis sur les cibles de performance. Il donne des idées et intervient plus sur le process et intervient moins sur les Inputs et l’Ouputs. Il est un médiateur et instaure un dialogue entre lui et le directeur et discute sur les résultats et son pilotage. Elle porte sur des questions essentielles à l’obligation de résultats.

 

La hiérarchie française est remplacée en Angleterre par la triangulation (ami critique). Le ressenti est transformé en développement professionnel (auto-évaluation). Le pilotage devient le leadership distribué  (partage des rôles et des responsabilités dans l’école via l’informatique comme les ENT > reporting) et la concurrence se conserve comme telle accompagnée tout de même d’une solidarité (PANDA).

 


Conclusion

 

            Du coup la France et l’Angleterre n’ont pas du tout la même démarche d’évaluation des acquis des élèves. Est-ce que les comparaisons sont fiables ? Est-ce que les directeurs et les chefs d’établissement  le veulent vraiment ? Doivent-elles être publiques les informations ? Est-ce qu’il faut laisser les écoles entrer en concurrence les unes avec les autres ?

 

            Attention aux données tronquées et à l’arrivée d’un marché scolaire. Plus on croise les informations, plus elles sont fiables et du coup, on favorise une meilleure acceptation des résultats de la part des enseignants et du directeur d’école. En effet, il est important que l’évaluation apparaisse de manière juste aux yeux des agents, acteurs et partenaires afin que l’évaluation soit acceptée. Pour cela, elle doit apparaître juste. On manque peut-être de cadres intermédiaires dans notre institution scolaire. Quel rôle pourrait jouer les pairs ? Doit-on avoir le même statut pour être « ami professionnel » ? Il faut créer de la confiance et de la cohérence. Le rôle des corps d’inspection va être obligé d’évoluer d’ici 30 ans.

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